Présentez-vous et racontez votre parcours au sein de la PIRAC
Patrice Lefaucheur, 58 ans, je croise le chemin de la Plateforme d’Intervention Régionale Amériques Caraïbes (PIRAC) à la suite du séisme qui a frappé Haïti le 12 janvier 2010, quand je pars sur place pour l’association Urgence Caraïbe, afin de gérer le déchargement d’une barge de près de 1 000 tonnes d’aide humanitaire, transportant notamment des stocks d’urgence de la PIRAC.
En 2011, une formation RIT (Regional Intervention Team) est organisée en Guadeloupe par la PIRAC en collaboration avec le bureau régional de la Fédération Internationale de la Croix-Rouge (FICR) basé à Panama. J’ai la chance d’y être invité par la PIRAC en tant que bénévole de la Croix-Rouge française de la Délégation Territoriale de Martinique.
Les années suivantes, je renforce mes compétences en tant qu’urgentiste en participant à une formation aux premiers secours et à une formation NIT (National Intervention Team) organisées par la Croix-Rouge française puis j’ai bénéficié de plusieurs formations sectorielles PIRAC à travers la Caraïbe (en évaluation des vulnérabilités & des capacités, eau, assainissement et hygiène, en abris temporaire d’urgence).
Mon premier déploiement sur le terrain dans le cadre d’une opération d’urgence de la Croix-Rouge française s’effectue en 2017 à Saint-Martin suite au passage du cyclone Irma. Je prends conscience de la valeur ajoutée des équipiers de réponse d’urgence PIRAC dans les déploiements caribéens, de par leur proximité géographique et culturelle avec les populations impactées et leur connaissance des risques majeurs et de leurs conséquences sur nos territoires.
Je suis ensuite déployé de nouveau avec la PIRAC en 2019 aux Bahamas suite au passage catastrophique de l’ouragan Dorian. Comme à Saint Martin, la proximité culturelle et la maîtrise du créole sont des atouts majeurs qui vont me permettre d’être associé à de nombreuses activités au sein de l’opération d’urgence. Je mets en pratique les compétences acquises au cours des différentes formations auxquelles j’ai participé et j’ai découvert le mécanisme d’une opération d’urgence de la Fédération internationale et des Equipes de Réponse d’Urgence (ERU), la collaboration avec la Croix-Rouge du pays et la coordination sectorielle avec les acteurs humanitaires régionaux.
Récemment, j’ai été déployé une nouvelle fois avec la PIRAC, cette fois-ci en Haïti en tant que coordinateur des distributions d’urgence, en réponse au séisme du 14 août 2021 qui a frappé le sud du pays.
Pourquoi avoir postulé à la formation Regional Intervention Team du programme READY Together ?
Dix ans après ma première participation à la formation RIT, il me paraissait essentiel d’actualiser et renforcer mes connaissances afin de me mettre à jour sur les nouvelles pratiques humanitaires et de continuer d’être efficace sur le terrain.
J’ai pu le faire grâce à ce nouveau cycle de formation organisé de mai à juillet 2021 dans le cadre du programme READY Together de la PIRAC.
Quels en ont été les bénéfices ? Pouvez-vous préciser les modules principaux de cette formation ?
J’ai énormément appris. La formation était constituée de nombreux modules touchant à des secteurs variés tels que la santé, l’eau & l’assainissement, la sécurité, l’engagement communautaire, la gestion de l’information, la communication, les ressources humaines ou encore le développement de plans d’action et de demandes de financement d’urgence. En fait, l’ensemble des aspects auxquels l’on se retrouve confrontés lors d’un déploiement sur une opération d’urgence de grande ampleur.
Cette formation vous a-t-elle permis de mieux appréhender votre déploiement sur l’opération d’urgence en Haïti ?
Totalement. Survenu juste quelques semaines après la fin de la formation, ce déploiement d’urgence a été une application parfaite de la formation RIT et des nouveaux enseignements que j’avais reçus dans de nombreux domaines sectoriels
Evidemment, après-coup on se rend compte qu’il aurait fallu avoir plus d’informations dans certains domaines comme par exemple les outils de collecte et d’analyse de données, si centraux dans les évaluations des besoins, ou encore sur l’articulation d rôles de chacun au sein d’un déploiement de grande ampleur mais c’est aussi le charme des déploiements d’urgence qui laissent toujours une grande place à l’inconnu et l’adaptabilité.
Comment s’est déroulé votre déploiement en Haïti ? Pouvez-vous nous faire un bilan de vos principales actions dans cette opération d’urgence, notamment sur les distributions et le soutien aux communautés impactées ?
Je suis très heureux et très reconnaissant de l’opportunité qui m’a été offerte de rejoindre l’opération et d’avoir contribué à apporter un soutien aux familles haïtiennes touchées.
Je tiens à souligner le contexte exceptionnel dans lequel ce déploiement s’est déroulé. Tout d’abord sur le plan sécuritaire, avec le blocage fréquent des axes routiers par de nombreux gangs qui a fortement restreint l’acheminement de l’aide humanitaire vers la zone sud affectée par le séisme. L’augmentation des kidnappings et des attaques armées dans le pays notamment sur les systèmes d’approvisionnement en carburant a également fortement impacté les services de base, notamment les hôpitaux, et paralysé le pays et bien sûr l’ensemble de la réponse humanitaire.
Le contexte social et politique ensuite, avec l’assassinat du Président haïtien 1 mois avant le séisme dans un contexte déjà présent depuis plusieurs mois de dégradation de la situation économique du pays, entraînant grèves et manifestations.
Cette situation transforme en véritable challenge les opérations de distribution et l’approvisionnement logistique des équipes déployées sur le terrain. Malgré cela de nombreuses distributions ont pu être réalisées et l’aide humanitaire a finalement rejoint les bénéficiaires qui en ont tant besoin.