La saison cyclonique bat son plein dans l’atlantique et le cyclone Erin vient de frôler les côtes caribéennes. Dans une région où chaque aléa peut bouleverser des milliers de vies, la PIRAC redouble d’efforts pour préparer les communautés, renforcer la culture du risque et développer la résilience locale.
Au cœur de cette mission, la PIRAC collabore avec le Centre Mondial de Référence des Premiers Secours (CMRPS). A l’occasion de la Journée mondiale des premiers secours, nous rencontrons Marie Carpentier, responsable de la zone Amérique-Caraïbe, qui œuvre pour que les gestes qui sauvent soient enseignés de manière harmonisée et adaptée aux réalités de la Caraïbe.
Qui êtes-vous ? Quel est votre parcours ? Et quel poste occupez-vous ?
Je m’appelle Marie Carpentier et je suis responsable de la zone Amérique-Caraïbe au Centre Mondial de Référence des Premiers Secours (CMRPS). Mon parcours scolaire et professionnel m’a amenée à diriger plusieurs associations et ONG : une structure locale de solidarité dans l’Oise, puis l’ONG Afghanistan Libre, qui œuvrait pour l’éducation et la santé des femmes. En 2023, j’ai rejoint le CMRPS, où je travaille aujourd’hui. Mon poste est financé par plusieurs programmes dont celui du 3 Océans soutenu par l’Agence française de développement . Ce projet est géré par la PIRAC, le bureau de la Croix-Rouge française dédié à la gestion des risques naturels basé dans les Caraïbes. Mon rôle est de coordonner et d’accompagner les Sociétés Nationales de la Croix-Rouge de la région dans le développement et l’harmonisation des formations aux premiers secours.
Qu’est-ce que le CMRPS ?
Le CMRPS est l’un des cinq centres mondiaux de Référence de la Fédération Internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.
Chaque centre est spécialisé sur une thématique : Centre climatique, Centre d’appui psychosocial, Centre mondial de préparation aux catastrophes, Centre de ressources des moyens de subsistance, Unité de recherche sur les abris. Le nôtre, basé en France et soutenu par la Croix-Rouge française, est dédié aux premiers secours.
Notre mission est d’harmoniser les pratiques à l’échelle mondiale : participer à l’élaboration des recommandations scientifiques, développer des manuels et outils pédagogiques, former des formateurs de formateurs et certifier des cursus. L’objectif : que les gestes de premiers secours soient enseignés de la même manière et avec la même qualité, quel que soit le pays.
Quel est ton territoire d’intervention et pourquoi celui-ci ?
Dans le cadre du programme 3 Océans (qui couvre également le sud de l’Océan Indien et le Pacifique mis en œuvre respectivement par la PIROI et la PIROPS), je travaille spécifiquement avec les Sociétés Nationales de la Caraïbe (Grenade, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Dominique, Antigua & Barbuda, Saint-Kitts & Nevis).
L’idée est de renforcer la résilience de ces pays, souvent vulnérables aux catastrophes naturelles. Nous adaptons les standards mondiaux aux réalités locales (langue, culture, ressources disponibles), afin que les formations soient à la fois conformes aux guidelines internationales et adaptées au terrain caribéen.
La Caraïbe et les Amériques sont des territoires particulièrement vulnérables. Dans les îles caribéennes, pratiquement tous les aléas majeurs peuvent survenir et affecter une grande partie de la population en très peu de temps. La fréquence et l’intensification de certains phénomènes sont également renforcées par le changement climatique. Renforcer les Sociétés Nationales de la Croix-Rouge, c’est donc investir dans une réponse locale, rapide et adaptée, au plus près des communautés. L’enjeu est double : sauver des vies en cas de crise immédiate et sur le long terme, contribuer à une culture de prévention et de résilience face au dérèglement climatique.
Quelles sont vos activités ?
Mes missions sont variées mais complémentaires :
- Créer et contextualiser des manuels caribéens de premiers secours ;
- Former les formateurs : le CMRPS a développé des cursus pour former aux Premiers Secours du niveau grand public (A) jusqu’aux “formateurs de formateurs” (C et D) ;
- Accompagner les Sociétés Nationales dans leur certification (Attestation Internationale de Premiers Secours – AIPS), pour garantir la qualité et l’uniformité des formations ;
- Coordonner les projets régionaux, notamment via le Caribbean Technical Advisory Group qui regroupe 13 Sociétés Nationales de la Caraïbe ;
- Soutenir les outils numériques comme l’Application Universelle de Premiers Secours développée par le CMRPS, qui rend accessibles à tous les gestes essentiels et les numéros d’urgence.
Cela dans le but de mettre à disposition des Sociétés Nationales des manuels harmonisés et contextualisés, d’assurer la transmission par des formateurs certifiés de leurs compétences de manière standardisée et de qualité, et enfin de permettre à plusieurs Sociétés Nationales caribéennes d’obtenir leur certification (AIPS), gage d’une reconnaissance internationale.
Vous avez récemment organisé une réunion à Bogota, pouvez-vous nous en dire plus ?
En mai dernier, nous avons organisé avec la PIRAC et la Croix Rouge colombienne, une grande rencontre régionale à Bogota réunissant 30 Sociétés Nationales des Amériques, cette rencontre a été rendue possible grâce au financement du projet “Ready 360 Phase 2” de la PIRAC financé par Interreg Caraïbes.
D’ailleurs, j’en profite pour ouvrir une parenthèse importante de notre quotidien, c’est l’association de plusieurs bailleurs qui permettent de construire des projets ambitieux et d’organiser des rencontres d’une telle ampleur.
Ainsi, pendant trois jours, nous avons animé des sessions et ateliers interactifs consacrés aux enjeux des premiers secours à l’échelle du continent : comment mieux nous fédérer face aux défis migratoires, climatiques et sanitaires, mais aussi comment renforcer nos coopérations régionales.
Un point essentiel des discussions portait sur la vision 2030 de la Fédération : parvenir à ce qu’au moins une personne par foyer, par établissement scolaire et par lieu de travail dans le monde soit formée aux gestes de premiers secours. C’est une ambition immense, qui nécessite à la fois des outils harmonisés, des formateurs compétents et des ressources adaptées à chaque contexte.
Les Premiers Secours sont universels : ce sont des gestes simples qui sauvent des vies et qui devraient être accessibles à toutes et tous. Mais pour être efficaces, ils doivent être enseignés de manière cohérente et adaptée au contexte local. Dans la Caraïbe, cette harmonisation est essentielle : elle permet à des Sociétés Nationales souvent petites de gagner en force collective. C’est ce travail commun qui fait sens et qui me motive au quotidien.
